Salon double, entrées récentes

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Davantage ici : Salon double

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Tarmac

31790159_6bb1fc120b_mJ’ai vu Nicolas Dickner partout : il tenait son citron en équilibre sur son doigt à la sortie de mon Métro, près de la compacteuse à canettes, mais aussi en haut des marches, Aux petits oignons, sur la rue Bégin (tout près des grands bras qui balayaient le café fraîchement rôti pour qu’il tombe dans le contenant un peu plus bas), et même probablement à la sortie de la quincaillerie (mais bon, je tenais un gril à légumes à triple ajustement de hauteur, une bouteille de colle à bois et trois-quatre factures, mon regard s’est égaré) — (pas la même photo en ligne, tant pis). Puis il s’est mis à clignoter partout sur mon ordi : dans les titres des articles du Devoir de la fin de semaine, dans mon agrégateur… question d’apprécier et de se laisser prendre à la frénésie fabulatoire et de trouver que le 15 avril, c’est bien trop loin encore.

 

(photo : « Hiroshima 1945 Ground Zero », ccgd, licence CC [Taken by the ships photographer of aircraft Carrier HMS Vengeance – my Fathers Ship – after delivering Royal Indian Air force Spitfires to Japan in late 1945])

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Québec Horizon Culture, suite et f…

1287662990_162da7a35a_mC’était hier. Très largement, l’événement avait l’allure d’une grand-messe — même si quelques figures ont tenté d’insuffler une dynamique carnavalesque à la rencontre. Beaucoup d’annonces, d’argent, plusieurs plaidoyers, souvent un même discours : soutenir à tout prix. Difficile d’être contre la vertu… Quelques observations, à titre de post mortem :

– ce gros show de chaises avait la principale qualité de susciter un show de coulisses : les gens se sont parlé, des rencontres ont pu être provoquées, des hasards ont placé les uns et les autres sur des trajectoires convergentes ; il faut rendre à l’événement ce bénéfice de favoriser le réseautage, car la très large partie des participants présents étaient du milieu culturel (et non strictement du milieu des affaires) ;

– le ton des interventions (dites planifiées ou spontanées, quelle différence ?) était variable, de l’auto-congratulation des quelques personnes d’affaires présentes (qui, en ayant les moyens de leur support, ne pouvaient rien faire d’autre que d’étaler leurs moyens…) aux demandes d’aide des autres, d’annonces de projets déjà bien ficelés à celles d’initiatives qui ont pu être financées sur-le-champ, par la magie de l’événement ;

– qui était invité ? la question reste difficile à répondre : de toute évidence, c’est le champ restreint de la création culturelle et artistique qui était visé, au sens le plus restreint — exit les musées, les institutions d’enseignement, les fonds de recherche… —, et encore, avec une touche bien sentie du côté du techno-culturel (d’où le cri des gens de l’univers du cirque, de la chanson et du disque, pour ne penser qu’à eux) ; c’est une vision bien ciblée de la culture qu’on a privilégiée — peut-être le fallait-il ? mais encore aurait-il été prévenant d’être plus explicite ;

– qui était là ? bien des gens n’ont pas été appelés à la barre (forcément pour des raisons liées à une vision, cf. paragraphe précédent) ; toutefois, je crois que le post mortem de l’organisation devrait s’inspirer d’un examen minutieux des organismes représentés dans l’assistance : bien des gens (et par là des organismes) étaient présents, constituant des antennes pour les secteurs a priori non invités, en périphérie de la conception étroite de la création culturelle et artistique… en soi, l’intérêt et la participation de ces gens témoignent de l’envergure de l’événement, et de ses retombées possibles — pourquoi ne pas commencer par aller chercher les commentaires, les suggestions, les perceptions, les idées de ces participants, et de là entamer le dialogue souhaité ?

– enfin, je me désole de la présence fantomatique de l’Université Laval : quelques rares têtes repérées dans l’assistance, une présentation trop peu engagée/concrète/inspirée de sa direction (où les statistiques de diplomation avaient valeur d’argument), absence des secteurs arts, littérature et culture dans cette planification de l’horizon de la ville — aussi bien continuer à croire que le campus n’appartient pas à cette ville.

Je me réjouis enfin de la place réservée à la littérature — je ne me faisais pas d’illusion… Mais le dynamisme de Gilles Pellerin et de l’équipe de l’Institut canadien / Gabrielle-Roy a permis de faire émerger ce volet de la culture, a priori peu versé dans le techno-culturel (il n’y a vraiment que le titre de G@brielle-Roy 2.0, qui ne me plaît guère, qui laissait croire à cette filiation techno). Une chance que les acteurs municipaux sont là pour insuffler une vitalité à la littérature dans la cité.

 

(photo : « The Ivory Tower is Covered in Ivy », Billie/PartsnPieces, licence CC)

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La littérature est-elle plastique ?

Rencontre organisée les 31 janvier et 1er février au Petit Palais (Paris), sous le thème de la plasticité de la littérature :

Lectures, mises en voix, mises en scènes, marathons, projections… : la littérature s’expose. Elle déborde, elle sort du livre où les pages la recèlent. Mais ces voix, ces scènes, ces images… ne sont-elles pas déjà vivantes dans le texte, dans le phrasé des mots ? Et ces mots d’où la voix s’émancipe : comment la font-ils entendre ? Murmurante ou théâtrale, intime ou parlée, ironique ou enjouée, toujours la voix varie. La question serait celle-ci : ce que l’on croit ajouter à la littérature pour lui donner plus d’ « ampleur », n’est-ce pas d’abord l’écriture qui le suscite et le porte en elle ? Faut-il lui apporter de l’extérieur des couleurs nouvelles, plutôt que de saisir les énergies qui l’habitent – sa vie, sa violence, ses silences parfois ? La littérature est-elle infiniment « plastique » que l’on puisse, en la déployant dans l’espace, prendre le risque d’oublier la page où le texte s’est écrit ?

Retour à une interrogation sur les voix dans la littérature (dans la continuité des travaux de Rabaté et d’Huglo), mais sous le regard du matériau.

Étrange que cette notion de plasticité que propose DViart, dans un contexte où l’on oublierait le support lui-même — vecteur pourtant fortement bouillonnant de la littérature contemporaine à travers l’expérimentation des plateformes (numériques), des modes de diffusion (à la Volodine) et des formes littéraires (la littérature contemporaine sera intergénérique ou ne sera pas…).

Événement signalé par remue.net ; programme disponible au format PDF.

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Le monde du livre… quelle perspective ?

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La vision du futur du livre est extrêmement variable, selon quelle conception est rattachée à l’objet-livre et à la pratique-littérature. Nostalgie du papier et de l’encre, fascination pour les technologies de l’encre numérique, marché (hors-marché, évidemment…) rattaché aux librairies comme lieu de diffusion du savoir, mondialisation du marché du livre… On se retrouve, de la sorte, devant des oppositions fortes, voire irréconciliables — nostalgie ou  craintes d’un changement irréversible, en regard de fascination curieuse, voire aveuglement techno-machin. On n’a guère dépassé le syndrome Birkerts : on a complètement oublié, depuis 1994, les propos sur la lecture et le livre de l’essayiste américain Sven Birkerts, ses Gutenberg Elegies l’ayant campé dans le rôle exclusif du néo-luddite en raison de ses attaques peu convaincantes contre les nouveaux médias. 

Clément met en parallèle deux textes récents pour illustrer cette opposition. De celui d’Hugh McGuire, je retiens ce passage, qui dit clairement ce que nous avons tous perçu des méga-librairies (mais jamais clamé) :

More: as time went on, it turned out that book sales weren’t really the most profitable kind of business these stores could do. Solution: reduce the shelf-space for books, increase the shelf-space for candles and trinkets. In Canada Chapters/Indigo has reduced book shelf-space from 75% to 60% (with Canadian fiction losing, and publishers cutting their lists in consequence). If the trend continues, books will be the minority in bookstores, and we might consider renaming them smelly candle stores that carry books.

The book business has stopped caring much about books.

Son pari sur le marché du livre (non tant l’économie que l’écologie du livre) est celui d’un bouleversement inévitable, voire nécessaire… d’où proviendrait la survie de cet univers complètement miné par les enjeux économiques :

Imagine: what would happen if every publisher in the world went out of business tomorrow? If every book store closed it’s doors?

Here’s what I think: I think we would see a flourishing of innovation and the kind of excitement the book business has not seen since the printing press was invented.

Vision bien virtuelle, trop hallucinée de la réalité du livre ? Pour une part, évidemment. Mais ce champ, déjà explosé, est propice à de nouvelles saisies par des acteurs qui n’auront pas peur de questionner les fondements de leur pratique. Peut-être tout continuera-t-il comme avant — mais les chances de changement de paradigmes (économiques, mais culturels et sémiotiques tout autant) paraissent bien grandes.

(photo : « the bookstore», petitecorneille, licence CC)

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