La vision du futur du livre est extrêmement variable, selon quelle conception est rattachée à l’objet-livre et à la pratique-littérature. Nostalgie du papier et de l’encre, fascination pour les technologies de l’encre numérique, marché (hors-marché, évidemment…) rattaché aux librairies comme lieu de diffusion du savoir, mondialisation du marché du livre… On se retrouve, de la sorte, devant des oppositions fortes, voire irréconciliables — nostalgie ou craintes d’un changement irréversible, en regard de fascination curieuse, voire aveuglement techno-machin. On n’a guère dépassé le syndrome Birkerts : on a complètement oublié, depuis 1994, les propos sur la lecture et le livre de l’essayiste américain Sven Birkerts, ses Gutenberg Elegies l’ayant campé dans le rôle exclusif du néo-luddite en raison de ses attaques peu convaincantes contre les nouveaux médias.
Clément met en parallèle deux textes récents pour illustrer cette opposition. De celui d’Hugh McGuire, je retiens ce passage, qui dit clairement ce que nous avons tous perçu des méga-librairies (mais jamais clamé) :
More: as time went on, it turned out that book sales weren’t really the most profitable kind of business these stores could do. Solution: reduce the shelf-space for books, increase the shelf-space for candles and trinkets. In Canada Chapters/Indigo has reduced book shelf-space from 75% to 60% (with Canadian fiction losing, and publishers cutting their lists in consequence). If the trend continues, books will be the minority in bookstores, and we might consider renaming them smelly candle stores that carry books.
The book business has stopped caring much about books.
Son pari sur le marché du livre (non tant l’économie que l’écologie du livre) est celui d’un bouleversement inévitable, voire nécessaire… d’où proviendrait la survie de cet univers complètement miné par les enjeux économiques :
Imagine: what would happen if every publisher in the world went out of business tomorrow? If every book store closed it’s doors?
Here’s what I think: I think we would see a flourishing of innovation and the kind of excitement the book business has not seen since the printing press was invented.
Vision bien virtuelle, trop hallucinée de la réalité du livre ? Pour une part, évidemment. Mais ce champ, déjà explosé, est propice à de nouvelles saisies par des acteurs qui n’auront pas peur de questionner les fondements de leur pratique. Peut-être tout continuera-t-il comme avant — mais les chances de changement de paradigmes (économiques, mais culturels et sémiotiques tout autant) paraissent bien grandes.
(photo : « the bookstore», petitecorneille, licence CC)
oui, le commerce des bougies et petits objets : ça m’avait bien frappé, en visitant 1 ou 2 librairies à Montreal, fallait vraiment tout traverser pour aller au fond où il y avait les livres… et c’était pas le Quartanier qu’on y trouvait – syndrome qui se répand de + en + vite chez nous aussi…
Pendant la période des Fêtes, j’ai subi une écoeurantite aiguë du Renaud-Bray. En cherchant des livres plus difficiles d’accès – ou qui ne sont tout simplement pas des best sellers, pour parler franchement – j’ai senti la rage monter en moi, puis le mépris pour ces endroits qu’on ose encore appeler des librairies.
J’étais tombé aussi sur l’article de Hugh McGuire qui synthétise brillamment ce que je pense de l’industrie actuelle du livres. C’est pourquoi j’encourage fortement le monde à magasiner dans les librairies indépendantes.
Et qu’on arrête de m’écoeurer avec des bougies, des vidéos du Canadien et des sacs d’école…
Cela dit, René, je découvre votre blogue que je trouve fort intéressant.
Chapeau!