Google : quand la quantité vise la qualité

Google se lance dans la numérisation de grandes bibliothèques universitaires (Stanford, Michigan, Oxford, et Harvard de façon limitée). On en parle partout (ex.: NY Times (abonnement requis), Libération). Un pas en avant pour l’accessibilité de la culture, sans nul doute.

Je ne peux m’empêcher de trouver bizarre, conceptuellement parlant, cette transformation de Google… Un moteur de recherche, une base d’indexation ? ce qu’est Google à la base ?, c’est un miroir, un reflet d’un ensemble de données extérieures à ce moteur. Mais quand le reflet se met à ajouter des éléments à l’image qu’il projette, on se retrouve avec un outil hybride, bien sûr, mais encore plus avec un changement de cap.

Que penser de cet engagement dans la diffusion du savoir, si ce n’est la volonté de prendre une place déterminante ? de faire un putsch scientifique ? Les moteurs concurrents ne pourront jamais égaler cette somme de savoirs (créée de toutes pièces pour les besoins de la grandeur de G.) ? de facto, ils sont déclassés. Déclassés dans la quantité du savoir, mais aussi dans la qualité : la validité parfois jugée douteuse des sites web se voit ainsi compensée par le poids de la science rendue accessible par la numérisation des ouvrages publiés par des éditeurs sérieux, reconnus par l’ensemble de leur production. Google rattrape l’ancien monde pour confirmer son monopole dans le cyberespace…

Ajout 1er janvier: le commentaire de Martin Lessard me conduit vers son mot sur le même sujet : Google et la bibliothèque virtuelle, où il renvoie à la page de présentation du projet par Google: Google Print. Ce qui me fait sursauter dans cette page, c’est l’absence de référence aux bibliothèques universitaires qui ont accepté de participer au projet. Comme quoi Google n’a pas besoin de la notoriété de Stanford, Harvard et Oxford pour avoir de la crédibilité… (ou est-ce la peur d’effrayer sa clientèle en faisant allusion à des universités?)

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3 réflexions au sujet de “Google : quand la quantité vise la qualité”

  1. Très bonnne lecture du phénomène.

    Par contre, la numérisation des ouvrages se limite à des oeuvres passées dans le domaine public.

    La transformation de Google a commencé en fait lors de l’acquisition de dejanews, puis de Blogger et la création des Groupes. Ils ne s’en cachent pas : « Google’s mission is to organize the world’s information and make it universally accessible and useful.  »

    Mais je ne crois pas que la « quantité du savoir » est une valeur à long terme. Google est aujourd,hui apprécié pour sa « précision ». Mais un concurrent pourrait développer demain un meilleur algorithme, notamment quelque chose utilisant le web sémantique ou des agents intelligents…

  2. Il est très juste de signaler que la transformation a déjà commencé à avoir lieu. C’est simplement que cette initiative correspond à mon sens au véritable virage, à cause du contenu « original » (virage parallèle avec Google Scholar, qui est d’un tout autre ordre).

    Précision de Google? Toute chose étant relative, oui… car il est un secret de Polichinelle que l’algorithme de Google est maintenant faussé par des pressions économiques, voire idéologiques (ce que ne font que répercuter, en fait, des méta-engins comme Mamma.com, qui reprennent les résultats proposés par des moteurs comme G.). Comment définir la précision alors? La justesse objective? (une définition svp?) ou le résultat que l’on souhaite voir apparaître, considérant les motivations idéologiques / commerciales qui nous gouvernent? (pourquoi arriver au plein texte si Amazon peut nous le vendre rapidement…?)

  3. Il est clair que ce virage en est un d’importance, car il consacre l’intégration des connaissances en ligne et hors ligne. Mais Dejanews, blogger et les Groups sont les « contenus » d’aujourd’hui, la connaissance « actuelle », le savoir « moderne ».

    Certes, ce n’est pas encore reconnu comme tel (on estime encore la communication en ligne comme moins légitime). L’imprimé possède cette aura de « vraie information’, et en ce sens, le virage a une portée plus symbolique que réelle : le livre ne participe pas de l’économie du gratuit qui sévit sur Internet. On aura jamais réellement accès à cette information (sauf pour les livres déjà mentionnés).

    Les anciennes acquisitions me semblent donc la vraie percée « tangible » de Google et G-Print n’est que la légitimité qu’ils se sont achetées.

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